Tiokétian
Premier jour de l’année 2016. Premier village de notre tournée régionale. Première surprise puisque nous voilà à trois vélos en compagnie de Yoro. Cette collaboration et engagement sénégalais est de bon augure pour l’avenir de Cinécyclo Sénégal. Alors, on commence petit avec juste 17 km, la bicyclette de Yoro « c’est du n’importe quoi », comme il se plait à le dire lorsque nous abordons des sujets bien moins futiles.
Bref, une belle piste, puis une piste plus petite, puis une autre encore plus petite, puis plus de piste et nous y sommes.
Yoro est ici comme chez lui, connu de tous, ce qui facilite grandement le traditionnel protocole d’arrivée. Bivouac chef le chef de village, projection programmée à l’école, diffusion de l’info dans le bourg tout « roule », sauf qu’au moment de démarrer la séance vers 20 heures, c’est la cata, la cata, la catastrophe.
La panne technique tant redoutée nous contraint d’annuler la séance et de la reporter au lendemain. Ce n’est pas à la frontale et dans la précipitation que nous pourrons comprendre et régler le dysfonctionnement.
Au petit matin, nous auscultons les entrailles du hibou. Non, il ne s’agit pas d’un rite animiste. Le hibou est le nom que nous donnons à notre boîtier génératrice, audio et vidéo. Nous testons l’installation, panne non reproduite, ça sent le faux contact. Resserrer vis et écrous, nettoyer les prises, vérifier les soudures, croisons les doigts pour la séance de rattrapage de ce soir. Allez courage, c’est la trentième, et elle se déroule sans fausse note et pour couronner la journée, nous pouvons en toute décontraction fêter les trente ans de Vincent.
Après deux, trois projections, nous tirons cette histoire de « panne » au clair : il s’agit d’un défaut de friction entre la roue arrière et notre génératride dûe à la poussière ambiante. Après tout, nos vélos roulent à longueur de journée sur des pistes de latérite ! Un coup de brosse avant chaque projection est maintenant de mise.
Tiabédji
Petit saut de puce, vers ce village où Yoro retrouve des amis d’enfance (surtout des filles !)
Ici, l’originalité aura été de faire faire l’annonce de la projection par le grillot qui a diffusé un message via le haut parleur de la mosquée juste avant l’appel à la prière de 17 H. Résultat une affluence record, avec plus de trois cents personnes que nous aurons du mal à contenir durant une séance pour le moins très chaotique. Il va bientôt nous falloir un service d’ordre. On se méfiera à l’avenir des annonces micro et des trops gros villages.
Hamadi Hery
Ce qui ne devait être qu’une étape de milieu de journée devient une halte et une soirée Cinécyclo. La raison : le contact exceptionnel avec Oumar Diallo, un chef de village au dynamisme incroyable. Il se bat sur tous les fronts, l’exploitation des producteurs par les négociants de coton, le développement du maraîchage comme alternative, l’obtention d’un forage, la plantation de clôtures en jatrofa ou méliféra etc….
Cet élan ne l’a jamais quitté, depuis qu’il y a une vingtaine d’années, il a quitté la montagne pour venir seul en pionnier s’installer sur ce petit plateau niché dans un cirque. Aujourd’hui, c’est plus de 250 personnes qui vivent à ses côtés.
Alors, un petit coup de main de notre grand écran pour asseoir son incontestable notoriété n’est pas de refus.
Itato 2
Cinécyclo plonge dans l’histoire de l’esclave. Si tout le monde parle de Goré peu connaissent l’existence de ce centre de transit des esclaves venus du Mali, de Guinée et d’au-delà avant qu’on ne les achemine vers Dakar pour les Amériques. La mémoire orale désigne comme seul vestige un trou béant dans lequel on précipitait les plus belliqueux. Si l’on s’en tient aux témoignages recueillis, il semblerait qu’une traite locale ait perduré jusqu’au tout début du vingtième siècle.
Nouvelle séance où, petit à petit, Yoro se rode à l’installation du matériel et s’avère d’une aide précieuse pour la traduction en poular. Faute de moyens, la francophonie a quelque mal à atteindre les villages de brousse.
En ce qui nous concerne, ce sera l’escale administrative et recommencer la procédure pour nos permis de séjour longue durée, puisque notre dossier déposé depuis deux mois et demi s’est perdu entre le ministère de l’intérieur et la DST. Donc, direction Kedougou à 10 km par un sentier et la traversée de deux marigots pour renvoyer via mail les documents nécessaires à notre contact à Dakar pour une nouvelle demande. La mésaventure ne nous arrange guère, puisque les trois mois de séjour autorisé arrivent à échéance dans moins de 10 jours.
Trop tard pour repartir sur la route, trop tard pour une projection, une journée de perdue en paperasse… Le chef de village, gardien de nuit dans un campement, nous accorde spontanément son hospitalité pour une nuitée supplémentaire.
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